Le volontariat épisode 2 : retour d’expérience
Dans le volontariat il n’est, par définition, pas question d’argent. Est-ce qu’un travail non rémunéré peut-être reconnu ? Je me demandais la semaine dernière quelle était la différence entre travail et entre-aide. Est-ce que les personnes qui cherchent des volontaires la connaissent, eux ?
Mais d’ailleurs, pourquoi les hôtes en viennent-ils à déposer une annonce pour un peu d’aide ?
Ils peuvent avoir effectivement besoin de bras pour fonctionner et alors le volontariat devient un moyen agréable et bon marché de combler ce besoin. Si c’est pour une activité dont ils vivent alors pourquoi ne pas employer des salariés qui seront plus compétents ? Ce n’est pas en quelques jours ou quelques semaines que l’on apprend un métier et que l’on devient efficace, à moins de ne faire que des travaux souvent peu valorisants ou intéressants. Si je fais le même travail qu’un employé dans une ferme alors dans ce cas pourquoi ne pas le faire de manière rémunérée ? Devenons-nous des travailleurs clandestins et non déclarés plutôt que des touristes avides d’échange et d’aventures ? Si le travail n’est pas agréable il faut qu’il nous apporte autre chose. Je pense tout de suite à sa valeur marchande. Combien me couterait un hébergement pour la nuit et deux repas que j’aurais cuisiné moi-même ? Mais il n’est pas question d’argent dans le volontariat.
De la même manière il n’est plus utile d’embaucher des employés de ferme si des jeunes gens des quatre coins du monde sont prêts à faire ce même travail pour un lit pour la nuit et un couvert supplémentaire à table. Je ne connais pas le potentiel impact sur l’économie locale mais j’ai croisé ici un certain nombre de volontaires grisés par le grand air et ravis de ne pas compter leurs heures.
Si c’est pour un projet artistique, bénévole ou personnel comme la construction d’une maison, alors avoir des volontaires permet d’avancer plus vite sans être une nécessité. L‘ambiance n’est pas la même qu’entre salariés, et l’idée d’exclure le rapport à l’argent entre les volontaires et les hôtes peut se révéler assez saine. On se rapproche de l’ami que l’on va aider à déménager et qui nous invite à l’apéro et l’aventure humaine peut commencer.
L’idéal pour un voyageur est d’être dans un endroit qui n’est pas une usine à volontaire et où la main d’œuvre n’est pas vitale mais appréciée. Situation rare et difficile à trouver !
J’ai quitté un boulot qui était bien payé et pour lequel mes compétences étaient appréciées et reconnues. Je ne vois pas l’intérêt de travailler à l’œil avec une reconnaissance et une utilité incertaines à la clé. On en revient à la question de départ : qu’est ce que je fais ici et qu’est ce que j’ai envie de faire ? Quelles sont ces autres choses que le volontariat pourrait m’apporter ? Je n’avais pas poussé ma réflexion jusque là avant d’arriver, j’imaginais simplement être accueillie par une famille avec qui j’allais partager des moments uniques et qui m’apprendrait la vie au grand air en échange d’un coup de main.
Les annonces laissent souvent à penser que le travail manuel sera agrémenté de participations aux excursions pour les touristes, que les volontaires pourrons accompagner et aider les guides. Je ne suis pas certaine que ce soit réellement le cas. A chaque fois que j’ai parlé de cette possibilité dans mes messages, les hôtes se sont fermés et n’ont ensuite fait qu’aborder le sujet du travail dans les champs ou à la maison, ou peut-être est-ce dû à mon faible niveau d’espagnol associé à un anglais pas toujours bien compris de l’autre côté de l’écran.
C’est un obstacle auquel je me suis heurtée pendant mes échanges : les mails sont assez impersonnels et amènent à des incompréhensions. Lorsqu’en plus s’y mêlent plusieurs langues qui ne sont pas maîtrisées par tous les interlocuteurs, les conversations peuvent vite faire l’objet de malentendus. J’aurais aimé pouvoir voir ou appeler mes hôtes avec skype plutôt que d’échanger quelques lignes qui relevaient plus du factuel : date d’arrivée, liste des tâches à faire, conditions d’hébergement ; que du ressenti : qu’est ce que tu aimes faire, quelle est l’ambiance de la maison, est-ce que j’apporte le camembert et le pinard ou des macarons et du champagne ? Ce sont pour moi des informations essentielles avant d’envisager de passer plusieurs semaines dans une famille, qui plus est en semi autarcie à la montagne. J’imagine bien la scène: repas d’arrivée, tous ensemble autour d’une grande table : l’asado sur le feu, l’odeur de la viande grillée, la première bouteille que l’on débouche accompagnant la première réflexion sur les pédés qui auraient envie de se marier ou autre réflexion raciste… Non ce n’est pas possible, parce que tu ne peux pas planter ta fourchette dans l’œil de ton hôte pour ensuite te retrouver à faire du stop au milieu de la campagne en pleine nuit et tenter de rejoindre la ville la plus proche. Ce n’est pas poli et surtout ce n’est pas très commode à gérer par la suite, ça fait tout de suite de mauvaises photos pour le carnet de voyage.
J’ai rencontré sur la route plusieurs volontaires, la plupart du temps dans de petites fermes alentours. Le volontariat a été l’occasion pour eux de faire des rencontres extraordinaires. On parle de véritables aventures humaines et d’amitiés qui perdureront une fois le voyage achevé.
Je vous avais dit que j’avais atterri à la Isla Tenglo, en face de Puerto Montt, le deal étant de travailler quelques heures par jour, 5 jours par semaine en échange d’un hébergement gratuit et d’un repas le midi lorsque je travaille. La maison rouge est située sur une île en face du club nautique où je donne un coup de main à rafraîchir l’intérieur d’un bateau en vente : peinture, nettoyage..
La Casa Roja, maison des volontaires est une grande bâtisse en bois à laquelle on accède par un portail sur la plage. Nous avons été jusqu’à trois personnes à y loger. J’ai une chambre douillette pour moi toute seule. La maison est magnifique et confortable. Les volontaires que je rencontre ici sont intéressants et il est bon de discuter et réfléchir tous ensemble à ce genre de question. Il semble que je ne sois pas la seule à me demander ce que je fais ici. Au fil des jours nous formons une petite équipe très agréable à vivre. Nous avons même augmenté nos effectifs pour Noël avec l’arrivée de ma mère !
La première semaine j’ai pensé que ce n’était pas ici que j’améliorerai mon espagnol. Je passais plus de temps à travailler à bord ou avec mes colocataires (un américain et une espagnole) qu’avec mes hôtes.
J’aurais préféré accompagner mon hôte dans son travail : nettoyer et bricoler un bateau certes mais avec lui plutôt que toute seule.
Durant le weekend les évènements prennent une toute autre tournure. Je deviens la 3ème nièce qui passe le weekend ici. On m’emmène partout, m’invitant à déjeuner et participant aux soirées en famille. J’ai alors l’occasion de me frotter à la langue chilienne : un espagnol très rapide teinté de mots d’argot que je m’efforce de comprendre.
Si je résume un peu, je suis actuellement logée à titre gratuit. Cela fait plusieurs jours que je ne travaille plus pour mon hôte qui est en vacances mais je continue à habiter notre château avec vue sur la mer. La propriétaire de la maison n’est présente que quelques mois par an. Le fait que la maison soit habitée en son absence permet de l’entretenir un peu, dissuade les voleurs et ne coûte rien à personne si ce n’est le peu d’eau et d’électricité que nous consommons.
Économiquement cela reste très avantageux même si nos hôtes ne nous nourrissent pas le soir. Les courses durent longtemps surtout quand nous sommes deux ou trois à cuisiner ensemble.
Le job me permet d’avoir une entrée dans la marina qui est ici le seul endroit où je pouvais trouver un bateau sur lequel embarquer. Et oui, remettre les pieds sur un quai m’a donné des envies de partir à nouveau au large !
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[…] Déjà adepte du covoiturage, je crois beaucoup à l’économie solidaire et je voyais dans le volontariat une opportunité de faire des économies en passant de bons moments, de partager des tranches de vie avec de franches rigolades pour toile de fond. Reste à découvrir si cette image correspond à la réalité ! […]